Ouvert au début des années 1970 dans les collines de Gassin, le village Air France vous accueille à quelques kilomètres du village de Gassin, des plages de La Croix-Valmer, dans l'un de ses hameaux, au camping dans un parc de 33 hectares.
Le Graffionier (parfois orthographié Le Graffionnier ou Grafionnier) est un village de vacances créé et propriété du comité central d’entreprise (CCE) d’Air France, réservé prioritairement aux membres du comité d’entreprise.
Il a été réalisé par deux architectes de l’Atelier d’urbanisme et d’architecture (AUA) au début des années 1970. il a été l’objet d’une controverse relative à son architecture moderne de la tendance brutaliste, dont les principaux traits ont été effacés lors d’une restructuration dans les années 1980.
SITUATION
Le Graffionier se situe dans la forêt des Maures, sur un terrain de 33 hectares, au cœur de la presqu’île de Saint-Tropez.
Il se trouve à moins de dix kilomètres des villages de Gassin et de Ramatuelle, des plages de Cavalaire-sur-Mer et La Croix-Valmer. Le haut du village se trouve à moins d’un kilomètre du sentier de grande randonnée 51.
ACCÈS
L’accès routier se fait par le boulevard Frédéric Mistral à La Croix-Valmer via la RD 559, qui rejoint les sorties autoroutes 36 du Muy sur l’A8 et 13 du Cannet des Maures sur l’A57 ainsi que la RD 98 au nord, et Toulon et Hyères à l’ouest. Plusieurs lignes d’autocars et bus du service départemental Varlib desservent la zone.
Les aéroports les plus proches sont ceux de La Môle-Saint-Tropez, Toulon-Hyères, Nice-Côte d’Azur et Marseille-Provence.
Les gares TGV les plus proches sont celles des Arcs-Draguignan, Saint-Raphaël et Toulon.
Les lignes maritimes côtières permettent au plus près un embarquement à Cavalaire ou Cogolin.
STRUCTURES
Concernant les hébergements, le village est structuré autour d’un bâti principal qui abrite l’hôtel Le Mas, doté de 21 chambres, qui fut créé lors de la restructuration de 1988. Les quatre hameaux du haut du village accueillent 135 appartements. Le village dispose aussi de « gîtes natures » et, depuis 1971, d’un camping avec 100 emplacements. Il dispose d’une capacité d’accueil totale de 682 lits.
Les touristes disposent sur place de deux restaurants sur place plus un snack en bord de mer, et de diverses installations : une salle de spectacle, une discothèque, un bar, trois courts de tennis, plusieurs piscines, un terrain multisports et une aire de jeux pour les enfants.
TOPONYMIE
Le nom du Graffionier vient du provençal graffiounier, qui désigne le bigarreautier, une forme domestiquée du cerisier sauvage.
Celui de La Vernatelle, qui a donné son nom au camping du village, est également un nom issu du provençal. Vernatello signifie « petite aulnaie », dérivé du provençal verno, « aulne ».
Le nom du centre du village, La Bastide, marque la volonté des créateurs du site de proposer une architecture moderne novatrice mais s’intégrant, en la renouvelant, à la tradition régionale. Parmi les autres noms de lieux donnés aux hameaux du village, citons l’écrivain Saint-Exupéry et le peintre Jean Lurçat. L’hôtel est baptisé d’un autre nom provençal, Le Mas.
HISTOIRE ET ARCHITECTURE
LE PROLONGEMENT D’UNE INSTALLATION À GASSIN
Lorsque le CCE d’Air France décide d’installer son futur village de vacances à Gassin, la commune est déjà connue de l’organisme.
Il a ouvert à Gassin en 1962 l’un de ses trois centres familiaux de vacances, L’Oasis. Situé sur le bord de la RD 559, entre Cogolin et La Croix-Valmer, il se trouve à moins de cinq kilomètres du futur village du Graffionier.
La nécessité d’un village de vacances est évoquée peu après. L’architecte initialement choisi se désiste au vu des fortes pentes du site. Le projet est discuté lors d’une session du CCE fin 1965 ; une maquette est présentée en 1966. Un permis de construire est déposé en août et les travaux sont envisagés pour l’année suivante.
Les choix des architectes sont fortement discutés et le permis de construire n’est validé qu’en 1968.
UN PROJET ARCHITECTURAL DE L’AUA
Le village de vacances du Graffionier est un projet commencé en 1965 et ayant ouvert en 1970, à une époque où les projets ce type se multiplient sur la Côte d’Azur. Le principe du lancement des travaux est acté par le CCE au début de 1968. La première pierre est posée en 1969, dans les premières semaines de l’année.
Après le désistement du premier architecte, le projet est porté par l’Atelier d’urbanisme et d’architecture de Paris avec deux de ses principaux membres : Paul Chemetov et Jean Deroche. D’autres membres de l’AUA participent au projet dont Annie Tribel pour les équipements intérieurs, Miroslav Kostanjevac et J. Venturelli pour la structure, Michel Corrajoud pour le paysage, Max Soumagnac pour la polychromie ainsi que Rémi Deroche et Louis Deroche.
Le projet est présenté comme novateur et social par ses artisans, proches du Parti communiste. Les deux architectes s’inspirent des projets Roq et Rob de Le Corbusier, ainsi que celui de Djenan el Hassan de Roland Simounet et de l’architecture brutaliste.
Ses promoteurs souhaitaient concilier le besoin d’intimité et les rencontres, à travers la mise en place d’espaces communs (restaurant, buanderie). Ils proposent la mise en avant du béton brut considéré comme un matériau noble à l’égal du bois ou de l’acier.
La commission des permis de conduire refuse le projet, jugé trop brutaliste, et fait introduire de nombreuses adaptations pour que le projet soit plus adapté au caractère régional.
Les choix assumés de l’équipe de l’AUA de privilégier le béton et de mettre des toits-terrasses au cœur du projet, des traits architecturaux non provençaux, provoquèrent la colère d’une partie des habitants et une importante polémique dans le monde urbanistique.
UN PROJET CRITIQUÉ
« On a fait des terrasses, oui c’est pas mal les terrasses, mais ce qu’on vient chercher en Provence, c’est la Provence, c’est pas la casbah de l’Algérie ni du Maroc : on veut des génoises et de la tuile ronde »,
dénonce le maire de Gassin René Chapelle en 1970 dans un sujet de l’émission Vivre aujourd’hui. La télévision consacrait la moitié de son émission au cas du village de vacances de Gassin qui accueillait ses premiers visiteurs depuis son inauguration le 3 avril 1970.
L’ORTF donnait la parole à différents protagonistes de la polémique autour du choix architectural. Selon son principal artisan, Jean Deroche, « sous des prétextes d’architecture, on nous reprochait surtout de faire un village de vacances pour un comité d’entreprise. Je crois que c’est là le fond du problème ».
Deux visions s’affrontaient : les acteurs de l’AUA revendiquaient clairement leur opposition au projet mené par exemple par François Spoerry à Port-Grimaud. Les deux projets, celui de l’AUA et celui de François Spoerry – qui construira 25 ans plus tard le nouveau village de Gassin – sont présentés comme deux extrêmes irréconciliables. Les autorités, présentes en masse lors de la pose de la première pierre (le préfet du Var est présent ainsi que les maires de Gassin et La Croix-Valmer), sont absentes lors de l’inauguration un an plus tard.
L’entrée du centre se fait par le bas de la colline. Une route mène à des parkings avant d’arriver au bâtiment principal du village. La « Bastide » est « assez monolithique et abrupt », traitée de « manière très monumentale, en réinterprétant librement l’expression des fermes fortifiées de Provence ». Elle abrite notamment l’accueil, une bibliothèque et un restaurant, ainsi que l’administration du centre.
Le village compte 180 logements et bungalows pour 675 lits. Un camping de 60 places ouvre un an plus tard, en 1971.
LA REFONDATION
Après moins de vingt ans d’existence, le village est l’objet d’une profonde refonte. L’idée qui a mené le projet initial, défendue au début par le CCE, est abandonnée, et c’est vers un style plus régionaliste que le comité d’entreprise décide d’aller.
Dans un document d’élaboration du permis de construire, le CCE souhaite désormais une architecture correspondant aux « aspirations du public à retrouver un climat provençal ». Au-delà de la volonté de pallier les problèmes de vétusté notamment, l’architecture moderne est révoquée, tant ses formes et l’organisation de l’espace que l’utilisation du béton : le public ne lui reconnaît pas de caractère « noble » comme le souhaitait Jean Deroche.
Les architectes choisis pour reconfigurer le centre, Jacques Péronne et Hugues Bosc, sont chargés d’améliorer le confort des logements, de créer un hameau supplémentaire et de donner à l’ensemble un style provençal. Les modifications sont importantes ; peu d’éléments du village primitif sont conservés. Jacques Péronne souhaitait préserver un exemple du style Jean Deroche en conservant une cellule-type originelle, ce qui n’avait pas été retenu par le CCE.
Des tuiles sont ajoutées aux logements des hameaux, qui sont agrandis ; le béton est recouvert d’enduit rose malgré les protestations des architectes ayant créé le village. Le projet de cinquième hameau est finalement abandonné.
La réhabilitation du village est assimilée à une nouvelle construction.
UN SITE EMBLÉMATIQUE DU CCE AIR FRANCE
Le site TourMag indiquait alors que, « inscrit au patrimoine du CCE Air France depuis plus de 60 ans, le site de Gassin fait partie des sites les plus attractifs du CCE et figure parmi ceux auxquels les agents Air France sont le plus attachés ». « C’est un site qui fonctionne bien avec des taux de remplissage très satisfaisants particulièrement en été », précisait le trésorier général du CCE.
Le site de Gassin possède une forte notoriété chez les utilisateurs d’Air France. La Confédération générale du travail, qui a été historiquement très liée avec le village et sa direction, met le Graffionier en avant sur la page consacrée au patrimoine du CCE. En 2017, le syndicat évoque une « réalisation audacieuse », créée pour « offrir le soleil à tous » face aux « nombreux promoteurs immobiliers et à la politique agressive des professionnels du tourisme ».
Le village est devenu l’un des grands ensembles emblématiques des constructions de la seconde moitié du XXe siècle sur la Côte d’Azur.